« Comme la philosophie, la musique est inconsistante, impalpable comme une bulle de savon ». Ainsi parle Jankélévitch ; nous sommes en 1939. Alors, Ravel et Roussel sont morts depuis moins de 2 ans, Debussy 21. Intangible et pourtant présence pure, la musique de ces maîtres éblouit le professeur : « [elle] n’existe presque pas » écrit-il, bouleversé. Tout, dans les partitions étudiées, relève de ce « je-ne-sais-quoi » qui sans cesse échappe. Formellement souples, soutenues par une harmonie résolument coloriste, ces pages déroulent des paysages imprécis, dont l’immobilité apparente est traversée d’éclairs.
Inscrits dans un moment de profonde rupture, où le XIXe siècle s’éternise pour les uns tandis que la modernité advient pour les autres, Debussy, Ravel et Roussel affirment de solides personnalités. S’ils respectent leurs prédécesseurs, ils sont dans le camp des modernes. La postérité parlera de leur impressionnisme, mot emprunté au vocabulaire pictural : face aux débordements d’émotion des derniers Romantiques, ils privilégient les sensations les plus concrètes que propose le monde naturel. La lumière changeante dans les branches hautes, les reflets sur l’eau, la morsure du vent – voilà, incertain, l’objet de leur étude, bonheur que nul n’élude et que la musique restitue. Ainsi Debussy rêve-t-il la volupté paresseuse d’un faune en mal de nymphes, assoupi parmi les herbes, dans la tiédeur de l’après-midi ; ainsi Roussel pense-t-il avec grâce et humour à ces heures d’avant sommeil où l’imagination s’anime ; ainsi Ravel danse-t-il dans une salle de bal aux contours fuyants. C’est tout, et puis c’est rien, c’est léger et pourtant grave – c’est là, puis ça s’envole, « comme une bulle de savon ».
Les recettes du concert seront reversées au fond de bourse de l’Académie Tibor Varga
Claude Debussy  /  Prélude à l'Après-midi d'un faune
Claude Debussy  /  Rhapsodie pour clarinette
Maurice Ravel  /  Introduction et Allegro, M. 46
Maurice Ravel  /  Valses nobles et sentimentales, M. 61
Albert Roussel  /  Le Marchand de sable qui passe, Op. 13
Pavel Vernikov
Violon
Svetlana Makarova
Violon
Alexander Gordon
Alto
Francis Gouton
Violoncelle
José-Daniel Castellon
Flûte
Florent Héau
Clarinette
Letizia Belmondo
Harpe