La littérature musicale pour violoncelle seul n’est pas abondante. Entre les monumentales Suites de Bach, composées dans la première moitié du XVIIIe siècle, et celles que Britten rédige entre 1965 et 1974 à l’intention de Rostropovitch, le silence est quasi-total et le XIXe siècle, en particulier, paraît résolument mutique.
Pourtant, dès la fin du XVIIIe siècle, l’instrument a acquis un statut central. Présent à l’orchestre, comme dans la musique de chambre, il est partout nécessaire et il semble paradoxal qu’alors même que rien (ou presque) ne se pense sans lui, il ait été à ce point négligé dans sa dimension « solitaire ».
Destinées à nourrir la pratique des élèves ou à animer la riche vie mondaine des salons, de délicieuses partitions voient pourtant le jour, dont les instrumentistes sont le plus souvent les auteurs. Ces pages « sur mesure » prennent volontiers le ton d’une conversation spirituelle, où la voix des cordes tour à tour éblouit, séduit, émeut ou impressionne. La forme du « caprice », si libre, s’impose d’elle-même pour donner à cette musique de circonstance son plus splendide atout : le charme. Parfois basés sur des mélodies connues (airs d’opéra à la mode, chansons populaires), ces caprices se révèlent inventifs, exigeants, mais toujours accessibles. Faits pour illuminer l’instant de leur présence, sans autre prétention que d’offrir un moment de musique pure, ils prennent pour modèle la capra latine, cette chèvre joyeuse à laquelle l’étymologie rappelle qu’ils doivent leur nom. Comme une chèvre, en effet, le caprice bondit là où le porte l’inspiration du moment ; il se rêve imprévisible, inattendu. Là où fleurit une herbe grasse, il court et si une mouche vient à le déranger, il s’enfuit lestement. La musique « capricieuse » réjouit donc par sa variété.
Longtemps oubliées, ces pièces sont aujourd’hui exhumées par Christophe Coin. Elles nous permettront de découvrir un violoncelle inédit, et dévoileront un large pan de la vie musicale des XVIIIe et XIXe siècles.
Bienvenue dans l’intimité, sensible et imaginative, des plus grands violoncellistes, et de leurs amis.
Oeuvres de Romberg, Dotzauer, Dall Abaco, Piatti, Battanchon, Tolbecques…)